Revenge porn : comment réagir ? l’avis d’un avocat spécialisé

Revenge porn : comment réagir ? l’avis d’un avocat spécialisé

octobre 13, 2021 0 Par Le pouce

Quelqu’un qui d’une manière ou d’une autre détient des images intimes de vous les diffuse sans votre accord. Gérard Haas, avocat spécialisé en droit numérique et cybercriminalité, nous explique aux confrères du magazine Néon, quoi faire en cas de revenge porn.

Dans quelle situation peut-on faire appel aux lois concernant le revenge porn ? Qu’est ce qui entre dans cette catégorie ?


Gérard Haas, avocat spécialisé en droit technologique de l’information et de la communication, droit numérique et cybercriminalité : Le revenge porn, ou pornodivulgation, consiste en la mise ligne de photos, de vidéos ou d’enregistrements vocaux érotiques ou pornographiques, pris avec le consentement de la personne mais dont la diffusion a été réalisée à l’insu de celle-ci. En 2016, dans le cadre de la loi pour la république numérique, comme il n’y avait pas de texte qui permettait de réprimer pénalement ce type de diffusions, l’article 226-2-1 du code pénal a été créé. Il permet de sanctionner pénalement la pratique de revenge porn.

En revanche, si un contenu à caractère sexuel a été créé, enregistré, à l’insu de la personne concernée, il existe d’autres incriminations. Il y a trois hypothèses : l’atteinte à la vie privée classique, dans ce cas il n’y a pas de consentement à la captation et à la fixation de l’enregistrement, ceci est prévu et réprimé par les articles 226-1 et 226-2 du code pénal. Vous avez un deuxième cas qui est une aggravation des peines de l’atteinte à la vie privée classique, puisque là il n’y a aucun consentement à la captation et à la fixation et de plus, c’est à caractère sexuel, cela est visé par l’article 226-2-1 alinéa premier du code pénal. Enfin, la troisième éventualité est la pornodivulgation : le consentement à la captation et à la fixation a été donné mais pas pour une diffusion. C’est l’article 226-2-1 alinéa 2 du code pénal qui s’applique alors.

Quelle est la peine encourue en cas de « pornodivulgation » ?
2 ans d’emprisonnement et 60 000 € d’amende.

Est-ce qu’il reste encore des vides juridiques à ce sujet selon vous ?
Aujourd’hui, il n’y a pas d’obligation d’identification de l’émetteur du contenu pornographique diffusé. Or, cela devrait être un préalable à toute diffusion, savoir qui poste le contenu. Par ailleurs, la technique pour faire supprimer le contenu est très compliquée. Dans le cas où l’émetteur a masqué son identité, il faut aussi pouvoir l’identifier. Dans le revenge porn, cette personne se cache parfois derrière un pseudonyme. Son identification est alors difficile : il faut demander à l’hébergeur qui est derrière le pseudonyme. C’est un véritable parcours du combattant : vous pouvez porter plainte contre X mais après, pour l’identifier, ce n’est pas évident.

Vers qui se tourner lorsqu’on est victime de revenge porn ?
Il faut aller au commissariat de police ou à la gendarmerie, pour porter plainte, ou écrire au procureur de la république. On peut aussi aller voir un avocat pour initier une action et faire le suivi de l’action.

Quelle est la différence entre la personne qui poste ou envoie en premier la photo de la victime, et celles qui la partagent ?
Ceux qui partagent sont complices. Ils la renvoient, donc chaque fois l’infraction est reproduite. Un récepteur du contenu qui devient lui-même émetteur est aussi répréhensible. La meilleure des recommandations à faire, c’est que pour éviter la pornodivulgation, la personne dont on va capter l’image, à supposer qu’elle soit d’accord, ne doit montrer qu’une partie de son corps et non son visage. Enfin, si vous recevez ce type de contenu, surtout ne le partagez pas, pour éviter de devenir complice de cette diffusion illicite.

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