Réforme du CFA : des avancées mais des appréhensions aussi

Réforme du CFA : des avancées mais des appréhensions aussi

décembre 23, 2020 0 Par Dorice Djeton

Annoncée à grand renfort médiatique par les présidents français et ivoirien à Abidjan le samedi 21 décembre, la réforme du franc CFA tant attendu semble se concrétiser. S’il y a des avancés à ce propos, des inquiétudes demeurent dans le rang des pays africains.

Le changement de nom, la fin du dépôt des réserves de changes en France et le retrait des représentants de la France dans les diverses instances et la gouvernance. Ce sont les axes majeurs que l’on peut qualifier de réforme dans le processus de changement du CFA en ECO. A en croire les déclarations des deux présidents, les billets de franc CFA devront bientôt être remplacé  par des billets d’Eco dans quelques années.

En effet, le FCFA va devenir l' »Eco », qui est en fait le nom choisi pour la future monnaie unique des 15 pays de la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cédéao). Mais pour l’heure, huit pays à savoir le Bénin, le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire, la Guinée-Bissau, le Mali, le Niger, le Sénégal et le Togo sont concernés. La Banque centrale des Etats d’Afrique de l’Ouest (BCEAO) ne devra plus déposer la moitié de ses réserves de change auprès de la Banque de France, une obligation qui était perçue comme une dépendance  avilissante vis-à-vis de la France par les détracteurs du FCFA.

La BCEAO n’aura à l’avenir plus d’obligation particulière concernant le placement de ses réserves de change. Et dans la même veine, la France devra se retirer des instances de gouvernance de l’Union monétaire ouest africaine (UMOA) où elle était présente. « La France ne nommera plus aucun représentant au Conseil d’administration et au Comité de politique monétaire de la BCEAO, ni à la Commission bancaire de l’UMOA », a expliqué l’Elysée. Il s’agit de désamorcer les critiques selon lesquelles la France continuait de dicter ses décisions dans ces instances via des représentants.

Mais tout n’est pas encore rose…

Au-delà de l’Euphorie qui accompagne la réforme du CFA, il convient de rester prudent  afin d’analyser les contours de ce processus afin que les pays de l’Afrique concernés n’y laissent pas encore trop de plumes. La convertibilité semble être un aspect pas totalement pris en compte dans cette réforme. Les huit pays qui s’engagent  dans ce processus sont-il en mesure de changer la nouvelle monnaie Eco en Livres sterling, en Yuan chinois ou en Dinar koweïtien sans passer par l’Euro ? une interrogation quo mérite encore réflexion.

L’on sait déjà que la parité fixe avec l’euro du franc CFA, futur Eco, est maintenue. C’est-à-dire que 1 euro équivaut à 655,96 francs CFA. Il s’agit d’éviter les risques d’inflation présente dans d’autres pays d’Afrique a expliqué le président ivoirien Alassane Ouattara. Cette parité fixe est pourtant l’une des caractéristiques du FCFA les plus critiquées par des économistes africains, selon lesquels l’arrimage à l’euro, monnaie forte, pose problème pour les économies de la région, beaucoup moins compétitives, qui ont besoin de donner la priorité à la croissance économique et à l’emploi plutôt que de lutter contre l’inflation.

Ces économistes plaident pour la fin de la parité fixe avec l’euro et l’indexation sur un panier des principales devises mondiales, le dollar, l’euro et le yuan chinois, correspondant aux principaux partenaires économiques de l’Afrique. Aussi, Paris conservera son rôle de garant financier pour les huit pays de l’UEMOA. « Si la BCEAO fait face à un manque de disponibilités pour couvrir ses engagements en devises, elle pourra se procurer les euros nécessaires auprès de la France », explique l’Elysée. Cette garantie prendra la forme d’une « ligne de crédit ». « Avec le maintien de cette garantie, en attendant l’Eco, nous voulons éviter la spéculation et la fuite des capitaux », a justifié Alassane Ouattara.

Le CFA, une monnaie qui a tant servi

Depuis sa création en 1945, le CFA a traversé un demi-siècle   et a été utilisé dans tous les échanges commerciaux en Afrique de l’ouest, dans les accords de prêts et toutes sortes de transactions que ce soient en lien avec les grandes structures financières  que les usages courants entre individu. A l’heure où l’ECO s’apprête à prendre place, l’on est en mesure de se demander comment se fera la transition à tous les niveaux. Il y aura certainement une période de transition afin que le CFA, soit totalement retiré de la circulation. Avec la fin imminente du CFA, une nouvelle ère s’ouvre manifestement  sur l’Afrique de l’Ouest. Au dirigeant de saisir la balle au bond.

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