Mort de Prigojine : l’avenir est-il vraiment incertain pour son célèbre groupe Wagner?

Mort de Prigojine : l’avenir est-il vraiment incertain pour son célèbre groupe Wagner?

août 25, 2023 0 Par Le pouce

Prigojine ex puissant homme de main de  Poutine était le leader emblématique du groupe Wagner. Une puissante entreprise axée sur un réseau de militaires, paramilitaires et économiques. Quel sera donc l’avenir de ses soldats après le décès  dans un accident d’avion du leader, vu qu’il n’a pas eu le temps de designer un successeur et que son adjoint aussi a perdu la vie de ce crash?

Le désormais feu Prigojine était considéré comme un traître pour avoir dupé le Président russe Vladimir Poutine depuis son putsch en juin dernier.
« Même en enfer, il sera le meilleur », écrivait mercredi une chaîne Telegram proche de la société paramilitaire, en saluant également la mémoire de Dmitri Outkine, le cofondateur de Wagner qui figurait lui-aussi sur la liste des passagers de l’avion qui s’est écrasé en Russie.

Les deux dirigeants étaient propriétaires d’un véritable empire, aussi bien militaire qu’économique et diplomatique, dont l’avenir balance.

Des miliciens de Wagner partis en Biélorussie

Sur le front ukrainien, Wagner était déjà en recul depuis plusieurs mois. A la pointe de l’offensive russe sur Bakhmout, ville capturée en mai dernier au prix de pertes humaines colossales, les unités du groupe Wagner avaient annoncé s’être repliées pour céder leurs positions à l’armée régulière.
C’est aussi à l’occasion de cette bataille que les tensions se sont accentuées avec le chef d’état-major, Valéri Guérassimov, et le ministre de la Défense, Sergueï Choïgou. Prigojine les accusait de priver Wagner de munitions et multipliait les critiques avec des vidéos d’insulte à leur encontre.

Les tensions ont culminé avec la rébellion avortée d’Evgueni Prigojine contre le pouvoir militaire central, un échec qui a semblé signer la disparition des soldats de Wagner du front.

Pour aller où?

Le Consultant défense pour BFMTV, le général Jérôme Pellistrandi voit mal les hommes de Prigojine intégrer l’armée régulière comme le souhaitait Moscou.
« Les miliciens avaient une fidélité totale envers leur chef Prigoijine. Dans l’armée, ce n’est pas le même système de commandement, ni le même rapport à l’autorité », estime le Général .
Relâchés dans la nature ou partis en Biélorussie pour jouer les « instructeurs » auprès du régime autoritaire d’Alexandre Loukachenko: l’avenir de ces anciens criminiels graciés par le pouvoir russe demeure incertain.

Les réseaux africains de Prigojine

La donne est toute autre en Afrique, où Prigojine a bâti un immense réseau d’influence. Au Mali et au Burkina-Faso, Wagner assure la sécurité des juntes au pouvoir en profitant du départ des troupes françaises. Les mercenaires assistent également le président pro-russe de la Centrafrique, Faustin-Archange Touadéra.
La présence du groupe est par ailleurs attestée en Libye, au Soudan ou encore à Madagascar. A la frontière entre contrats publics et affaires mafieuses, Wagner s’enrichit grâce aux minerais enfouis dans les sols des pays où il intervient.
Passé maître dans l’art de la « guerre hybride », Prigojine jouait aussi en Afrique un rôle de propagandiste, en soufflant sur les braises du ressentiment anti-colonial, notamment à l’égard de la France.
En quelques années, l’ancien « cuisinier de Poutine » est devenu l’une des principales figures russes en Afrique, avec une influence au moins égale à celle du ministre des Affaires étrangères Sergueï Lavrov.
« Wagner rend la Russie encore plus grande sur tous les continents, et l’Afrique plus libre », triomphait-il dans une vidéo non-datée publiée lundi dernier, sa première apparition en vidéo depuis le putsch manqué de juin mais aussi sa dernière avant sa mort.

« Cette vidéo représentait une véritable humiliation pour Vladimir Poutine, qui le même jour assistait au sommet des Brics en visio-conférence, faute de pouvoir se rendre en Afrique du Sud », décrypte pour BFMTV.com Lova Rinel, chercheuse associée à la Fondation pour la recherche stratégique (FRS).

Quel héritier pour l’empire Wagner?


Prigojine écarté, Vladimir Poutine devrait vouloir reprendre la main sur son empire africain. « De l’Afrique dépend la crédibilité de la Russie à l’Onu, où Moscou porte un discours de non-alignement et un narratif anti-occidental », souligne la chercheuse.
Mais la tâche s’annonce difficile pour le Kremlin. « Le système Wagner en Afrique est complexe et opaque. Seul Prigojine en connaissaît les moindres recoins. Il avait aussi tissé des liens forts avec de nombreux responsables politiques africains. Ce sera difficile de prendre sa place », anticipe Lova Rinal.
Une chose est sûre, si quelqu’un reprend en main les affaires africaines de Prigojine, « ça sera un profil qui aura prêté allégeance à Vladimir Poutine », assure notre experte.
« Le conseil de commandement de Wagner compte 35 dirigeants, il y en a peut-être parmi eux avec qui il est possible de commencer des négociations », avance de son côté Elsa Vidal, directrice de rédaction russe de RFI, sur notre antenne.

« D’autres sociétés militaires privées (SMP) pourraient prendre la relève », ajoute la journaliste, en citant le groupe « Redut », similaire à Wagner mais plus proche du ministère de la Défense.
Pour Lova Rinel, Wagner ne va pas s’effondrer mais « rentrer dans un temps de recomposition, comme lorsqu’une mafia perd son chef ».

*Fernandez Gobessou (Stag)

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